Laetitia Ky, l’artiste qui décoiffe !
Si vous ne la connaissez pas, vous n’êtes pas à la page ! Jeune influenceuse en plein boom sur la toile et ailleurs, l’Ivoirienne Laetitia Ky totalise aujourd’hui près de 500 000 abonnés sur son compte Instagram. Si elle s’est fait remarquer grâce à ses sculptures capillaires tour à tour délirantes, poétiques et engagées, cette tresseuse de génie a plus d’un tour dans sa besace et bien des crins à son arc. En vérité on vous le dit, la tempête Ky ne fait que commencer !
Laetitia Ky, Medusa’s Gaze, impression couleur sur plexiglass-diasec satiné, #5/5 + 2 AP, 50 x 75 cm, 2022.
Laetitia Ky a 25 ans. À peine un quart de siècle, et déjà bien des accomplissements à son actif : une marque de vêtements, Kystroy, combinant wax et jean effiloché ; un atelier à Abidjan spécialisé dans les « Ky Braids », des tresses originales à base de tissu wax ; des collaborations avec les créateurs de mode Marc Jacobs et Giuseppe Zanotti, ou encore la chanteuse Di’Ja ; le rôle de la Reine – dont elle a elle-même conçu les somptueuses coiffures – dans « La Nuit des Rois » de Philippe Lacote ; une place dans le Guinness Book 2022 pour avoir effectué le plus de sauts à la corde autour de ses cheveux tressés, et « Love & Justice », un livre qu’elle vient d’achever, à mi-chemin entre l’art book, les mémoires et le manifeste féministe.
« Artiviste » de choc, Laetitia est principalement connue pour ses compositions capillaires ébouriffantes, auxquelles elle donne des formes incroyables en y incorporant divers matériaux : fils de métal, laine, cintres, aiguilles, wax, extensions…
L’aspect visuel ultra attractif de ses créations – qui peuvent lui prendre jusqu’à 3 heures de travail – est néanmoins indissociable d’une forme d’engagement : derrière chaque motif ou saynète représenté (bulles de bande dessinée, organes génitaux féminins, poing levé à la Black Panthers, scènes de harcèlement sexuel ou de violence conjugale, animaux totems, humoristiques ou de compagnie, paires de mains ou de seins supplémentaires, symboles, objets du quotidien…), un message fort d’émancipation féminine à travers lequel elle revendique ses racines et son héritage africain, à la croisée des mouvements #MeToo et Black Lives Matter.
Si la jeune femme est tombée dans les tresses dès son plus jeune âge, c’est en 2016 qu’elle a eu le déclic, devant une série de photos montrant l’incroyable sophistication des coiffures arborées par les femmes noires de l’époque précoloniale – lorsque les membres des tribus façonnaient leurs coiffes selon des formes conçues pour transmettre force, puissance et fascination.
Dans la foulée du mouvement nappy et du combat d’égalitarisme mené par de nombreuses féministes afro-descendantes qui revendiquent leur identité à travers leurs cheveux, l’artiste contribue à éveiller les consciences sur les questions de race, de genre ou de justice sociale avec un style bien à elle mêlant l’humour déjanté des cartoons, l’élégance disruptive d’un Jean-Paul Gautier ou d’une Loza Maléombho, et des touches de poésie parfois surréaliste. Spectaculaire, insolite et revendicatif, le « Ky Concept » n’a pas fini de vous étonner. En tout cas, nous, on est fan !
Facebook : Laetitia Ky ?
Instagram : @laetitiaky
Par E. Vermeil
Publié en décembre 2021